“J’écris ce livre depuis un lieu qui n’existe pas . Un laboratoire fantôme, sans ombre au mur. (…)
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Une page raturée devient un amas de branches coupées. Une table, l’observatoire de ce qui a été traversé. Les cartes retournées. Le chaos encadré. Voici mon ordre. Il a échappé à la rature, au panier.
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Raturer laisse des trous, des vides. Par ces interstices entre la nuit, l’attente, de nouveaux liens.
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Accepter sa propre pensée est une étape nécessaire. Parfois très difficile. Peur de blesser, de choquer, de décevoir.
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Raturer, c’est s’affirmer dans sa pensée. Progression infime.
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Sortie de soi pour les uns, entrée en soi pour d’autres, l’acte de penser est ma manière de poser mes limites.
Je décide de ce que je suis capable de retenir du monde.
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Plusieurs phrases ont été écrites dans l’air, parfois sous la dictée. Même dans la voix, il y a des ratures. Même dans le paysage. L’horizon est une rature. […] “
Louise Warren, “Le laboratoire des ratures”,
La Vie flottante. Une pensée de la création,
Montréal, Editions du Noroît, 2015